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Modéliser l’impact des projets agro/forestiers sur le système sol-eau

Décryptages

Les sols et l’eau fonctionnent comme un système et sont intrinsèquement liés. Il est fondamental de prendre en compte la santé de ce système dans le design des projets et d’évaluer les bénéfices générés grâce à leur implémentation. En réintégrant des arbres au sein d’un paysage, là où ils étaient absents ou peu présents, quel impact pourra être observé sur le cycle de l’eau, l’augmentation de l’infiltration des eaux de pluie dans le profil du sol et la diminution du ruissellement et de ses risques ? Afin d’obtenir des données spatialisées pour ces indicateurs d’impact, Reforest’Action utilise un outil de projection fondé notamment sur la télédétection.

Un outil pour projeter l’impact sur les sols et l’eau

Modéliser les flux d’eau à l’échelle d’un bassin versant

Afin de modéliser la quantité d’eau infiltrée et la quantité d’eau ruisselée à l’échelle d’un écosystème et de projeter l’évolution de ces métriques après l’implémentation d’un projet, le pôle Impact et R&D de Reforest’Action utilise le modèle VWBA (Volumetric Water Benefit Accounting) développé par le World Resources Institute, et s’appuie sur l’outil Invest qui prend en compte un large éventail de facteurs, dont certains grâce à la télédétection :

  • Le volume des précipitations
  • L’évapotranspiration potentielle (ETP)
  • Le groupe hydrologique des sols
  • La topographie
  • Le type d’usage et de couverture des sols
  • Le coefficient d’aptitude au ruissellement (curve number)

Nos trois indicateurs de projection d’impact

L’outil utilisé par Reforest’Action permet d’illustrer la circulation de l’eau au sein d’un bassin versant (ensemble de la surface qui reçoit les eaux circulant vers un même cours d’eau ou vers une même nappe d’eau souterraine). Cet outil permet également de fournir une cartographie des flux d’eau.

Il est alors possible de modéliser le paysage après l’implémentation du projet en obtenant des données spatialisées pour trois indicateurs de projection d’impact : l’évapotranspiration, le ruissellement évité et la recharge locale des nappes en millilitres.

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Cartographie des flux d’eau au sein du bassin versant de la zone du projet d’agriculture régénératrice développé par Reforest’Action en Inde (Odisha)

Un outil d’aide à la conception des projets

« Concrètement, cet outil est un outil de projection d’impact, car il nous permet de modéliser la quantité de ruissellement qui pourra être évitée grâce à l’implémentation des projets », explique Richard Sourbès, expert SIG et télédétection chez Reforest’Action. « Le modèle utilisé nous permet d’adapter le design des projets à la ressource sol-eau locale, en ciblant, en amont du projet, des zones où le fait de reboiser ou d’intégrer des arbres en agroforesterie présentera un fort intérêt. C’est donc également un outil de conception des projets et une aide à la planification. »

Les impacts attendus des projets sur le système sol-eau

Diminution du ruissellement et dépollution de l’eau

Les arbres plantés nécessitent certes un apport en eau important au cours de leur croissance, créant temporairement une diminution de la quantité d’eau disponible dans les sols. Toutefois, dès leurs premières années de croissance, ils permettent de diminuer le ruissellement en absorbant l’excès d’eau à la surface des sols, et ainsi d’assurer le bon fonctionnement du cycle de l’eau et des nutriments nécessaires au développement de la flore et de la faune.

L’évitement du ruissellement permet également une dépollution de l’eau qui s’infiltre dans les sols, un impact particulièrement bénéfique au sein des milieux agricoles. En effet, la filtration de l’eau par les arbres permet d’éviter le transfert des polluants depuis les terres jusqu’au réseau hydrologique.

« Concrètement, les arbres plantés permettent de diminuer le ruissellement, d’augmenter notablement le potentiel d’évapotranspiration de l’écosystème, et, dans une moindre mesure, la recharge locale des nappes. Ils permettent également de réduire les connections entre le milieu agricole et le réseau hydrographique, et donc de limiter les transferts potentiellement polluants (excès de matière organique, fertilisants, pesticides, etc.) Ils jouent ainsi un rôle de barrière physique, chimique et biologique. C’est cette triple fonction qui réduit le risque de dégradation des masses d’eau. Les arbres plantés contribuent donc à influencer la qualité et la quantité d’eau au sein du réseau hydrographique contigu au projet. », précise Jean-Christophe Renaud, responsable de projet en agriculture régénératrice pour Reforest’Action.

Augmentation de l’évapotranspiration réelle

A moyen terme, la restauration ou la création d’un écosystème forestier ou agroforestier permet de réduire le temps de réponse d’un bassin versant au stimulus de la pluie, par la réduction du ruissellement : autrement dit, la goutte d’eau arrive moins vite à l’exutoire.

De surcroît, au cours des 30 premières années qui suivent l’implémentation d’un projet, une augmentation de l’évapotranspiration réelle (quantité totale d'eau qui s'évapore du sol et des plantes présentes dans une zone lorsque le sol est à son taux d'humidité naturel) peut être observée, qui donne lieu à la formation de nuages et à un volume accru de précipitations à l’échelle du bassin versant.

« D’après les résultats de nos projections d’impact, les projets de restauration des écosystèmes forestiers et agroforestiers peuvent, à terme, augmenter à la fois la qualité et la quantité d’eau (verte et bleue) circulant à l’échelle d’un bassin versant », conclut Jean-Christophe Renaud.

Des pratiques empruntées à l’hydrologie régénératrice

Par ces travaux de recherche et de développement, Reforest’Action souhaite prendre en considération la régénération des cycles de l’eau douce dans le design et la mise en œuvre des projets, et ainsi déployer des pratiques qui permettent d’améliorer la répartition, l’infiltration et le stockage des eaux de pluie et de ruissellement, afin d’améliorer la résilience des écosystèmes face aux problématiques liées à l’eau (sécheresses, érosion, désertification, inondations…) – autant de pratiques clés de la science de l’hydrologie régénératrice.