Reforest’Action / Le Science Based Target for nature (SBTn) : pour des trajectoires de réduction des impacts des entreprises
Toute l'actualité

Le Science Based Target for nature (SBTn) : pour des trajectoires de réduction des impacts des entreprises

Stratégie et RSE
Climat et Biodiversité

Dans la lignée des travaux menés par l’Initiative Science-Based Targets (SBTi) sur le climat, le Science Based Target for nature (SBTn) a pour objectif d’encourager les entreprises et les villes à se fixer des objectifs scientifiques afin de préserver les écosystèmes locaux et garantir une gestion soutenable des ressources. Cette Initiative a ainsi publié en mai 2023 la première version de ses objectifs scientifiques pour la nature . Les entreprises peuvent établir des trajectoires de réduction de leurs impacts en respectant - à ce stade, les limites écologiques pour l'eau douce et la dégradation des écosystèmes terrestres. A cet ensemble de lignes directrices s'ajouteront des orientations sur la santé des océans, la biodiversité et le climat publiées d'ici 2025.

Face au déclin sans précédent du vivant, les entreprises doivent commencer à agir sans attendre et à grande échelle afin d’inverser la tendance actuelle. Le SBTn fournit les conseils techniques et les outils adaptés. En commençant le processus de définition des cibles SBT dès maintenant, les entreprises se donnent les moyens d’agir rapidement et au bon niveau.

Des objectifs scientifiques globaux pour la nature

Afin de fixer leurs objectifs scientifiques pour la nature, les entreprises doivent suivre les cinq étapes du cadre décrit dans le guide du SBTn publié dès 2020 - un référentiel d’actions en faveur de la nature à destination des entreprises. A l’heure actuelle, seules des conseils techniques liés aux trois premières étapes présentées en mai 2023 ont été diffusés :

1° Les trois premières étapes présentées en mai 2023 :

Le Science Based Target for nature (SBTn) : pour des trajectoires de réduction des impacts des entreprises

1. Évaluer :

Les entreprises doivent produire une estimation de leurs effets à l’échelle de la chaîne de valeur et de leurs dépendances vis-à-vis de la nature puis dresser une liste de problématiques potentielles.

Voici un exemple concernant la biodiversité :

• Établissement d'une base de données sur les activités et l'impact environnemental : collecter des données sur les activités de l'entreprise et leur impact sur la biodiversité ; inclure éventuellement l'examen des conséquences potentielles des activités sur les écosystèmes.

• Définition des activités à haut impact : identifier les activités qui ont le plus grand impact sur la biodiversité.

• Évaluation de l'impact : évaluer l'impact de leurs activités à haut impact sur la biodiversité en se basant sur les SBTn en utilisant des méthodologies d'évaluation environnementale telles que la Life Cycle Assessment (LCA).

• Détermination des priorités d'action : déterminer les priorités d'action en matière de protection de la biodiversité en fonction de l'impact de leurs activités et de la disponibilité de solutions pour réduire cet impact.

2. Interpréter et hiérarchiser :

Les entreprises doivent fixer des cibles et des priorités. Elles doivent considérer par exemple les écosystèmes les plus précieux - comme les zones où les personnes dépendent le plus de la nature pour leur vie et leurs moyens d’existence ainsi que les zones où les activités de la chaîne d’approvisionnement ont le plus d’impact.

3. Mesurer, fixer et divulguer :

Les objectifs scientifiques pour les impacts environnementaux identifiés aux étapes 1 et 2.

2° Les deux dernières étapes définies dans le guide de 2020 :

4. Agir :

Dans le cadre de la poursuite de leurs objectifs, les entreprises sont guidées par une hiérarchie d’objectifs (la « hiérarchie des mesures d'atténuation »). Le SBTn préconise d'abord d'éviter puis de réduire les impacts lorsque l'évitement n'est pas possible. Ensuite, elles doivent restaurer les écosystèmes et régénérer les stocks de capital naturel.

En ce sens, le fait d’agir signifie :

• Éviter : empêcher l'impact de se produire ou l'éliminer complètement en choisissant un autre lieu, un autre processus ou une autre échelle de temps - par exemple, en évitant à 100 % la déforestation ou la conversion d'écosystèmes intacts ou en évitant de s'approvisionner auprès de pêcheries dont les stocks dépassent les niveaux durables.

• Réduire : minimiser les impacts négatifs autant que possible en reconnaissant que l'élimination totale peut ne pas être possible dans le cadre du modèle commercial actuel ou en raison des pratiques de production (minimiser si l’on ne peut réduire). Par exemple, l’entreprise peut réduire ses émissions, la pollution et l'utilisation de l'eau.

• Restaurer et régénérer : lorsque les impacts ne peuvent être évités ou réduits complètement. La restauration signifie initier ou accélérer le rétablissement d'un écosystème quant à sa santé, son intégrité et sa durabilité. Il peut s'agir de restaurer l'habitat naturel sur les terres les moins productives ou de revégétaliser des zones. La régénération se distingue de l’approche uniquement réparatrice de la restauration écologique. Elle engage à mettre en place des actions pour assurer la stabilité et la résilience des écosystèmes dans le temps. Elle vise à recréer les conditions d’expression des capacités d’auto-renouvellement du vivant en réactivant les processus écologiques endommagés ou surexploités par l’activité humaine. Elle met l'accent sur les contributions spécifiques de la nature à l'homme, par exemple, la séquestration du carbone, la production alimentaire et l'augmentation de la rétention de l'azote et du phosphore dans le cadre de l'agriculture régénératrice.

• Transformer : en mettant en place des actions contribuant au changement à l'échelle du système, par exemple par le biais de facteurs technologiques, économiques, institutionnels et sociaux et de changements dans les valeurs et les comportements sous-jacents.

5. Communiquer :

Des orientations détaillées sont en cours d’élaboration en matière de mesure, de déclaration et de vérification.

La réduction des impacts envers l’eau douce et les écosystèmes terrestres

Afin d’élaborer sa méthodologie, le SBTn s’est fondé sur les travaux de l’IPBES de 2019 portant sur les facteurs de pression sur la biodiversité ainsi que sur la notion de limites planétaires de Rockström (2009) . Une première version présentée en mai 2023 permet de déterminer des cibles afin de réduire les impacts sur :

1. L’eau douce

Des indicateurs permettront aux entreprises de traiter les problèmes liés à son utilisation et à la pollution . La méthodologie encourage les entreprises à s'intéresser à la quantité et à la qualité de l'eau douce, en particulier aux flux d'eau de surface, aux niveaux des eaux souterraines et à la pollution par les nutriments tels l’azote et le phosphore.

2. La restauration des écosystèmes terrestres

Les objectifs relatifs aux terres concernent toutes les entreprises ayant des incidences matérielles sur la nature. Celles-ci peuvent en effet avoir un impact sur l’utilisation ou la gestion des terres compte tenu de leurs activités ou de leur chaîne d’approvisionnement en amont notamment.

Trois objectifs principaux consistent à :

  1. Ne pas convertir les écosystèmes naturels, qu’ils soit développés ou défrichés - principal facteur de perte de biodiversité terrestre.

  2. Réduire l'empreinte foncière afin de préserver la capacité de résistance des écosystèmes naturels dont dépendent les systèmes humains.

  3. Engager l’entreprise au niveau du paysage (landscape engagement). Cet objectif vise à stimuler l'action et les efforts des entreprises dans le cadre de processus collaboratifs multipartites à l'échelle du paysage afin de régénérer les terres cultivées, restaurer les écosystèmes dégradés ou convertis mais aussi transformer la manière dont les entreprises agissent dans les paysages et s'en inspirent.

Conclusion

Le SBTn représente un référentiel ambitieux basé sur la science qui encourage les entreprises à développer des trajectoires de réduction de leurs impacts sur la nature. Chez Reforest’Action, nous pensons qu’il est urgent d’agir à tous les niveaux et sans attendre afin de protéger le vivant. Rappelons qu’il existe un lien étroit entre l'économie, la survie des populations et la protection des écosystèmes. Plus de la moitié du produit intérieur brut mondial (44 000 milliards de dollars) dépend modérément ou fortement de la nature et de ses services, tels que la fourniture de nourriture, de fibres et de combustibles.

Convaincu que les entreprises peuvent être sources de régénération du vivant, Reforest’Action souhaite contribuer à leur transformation grâce à des solutions fondées sur la nature, leur permettant d’agir dans ou au-delà de leur chaîne de valeur. Reforest’Action mobilise ainsi ses forces autour du déploiement de l’agriculture régénératrice, du développement de projets carbone et de la mesure d’impacts. Nous avons ainsi déjà mené depuis 2010 plus de 1500 projets au sein de 46 pays grâce - principalement - aux financements de plus de 3 000 entreprises.

Références :

Public consultation on corporate technical guidance. Piloting freshwater SBTs for nature – corporate case-studies. SBTN frequently asked questions. SBTN’s Initial Guidance (2020) – executive summary. SBTn, Webinar, Introducing the first science-based targets for nature. Le Rapport Planète Vivante 2022, contenant l'Indice Planète Vivante 2022. IPBES, Seconde évaluation mondiale de l'état de la biodiversité, 2022. World Economic Forum, Nature Risk Rising: Why the Crisis Engulfing Nature Matters for Business and the Economy, 2020.