Reforest’Action / Qu’est-ce que des « Solutions fondées sur la Nature » (SfN) ?
Toute l'actualité

Qu’est-ce que des « Solutions fondées sur la Nature » (SfN) ?

Décryptages

Les Solutions fondées sur la Nature (SfN) sont supposées apporter des intrants essentiels à la production et générer de précieux apports pour l’économie. A cet égard, elles font référence à une famille d’approches novatrices considérant les processus écologiques comme des services insérés au sein des systèmes de gestion des infrastructures afin de planifier, concevoir et financer des initiatives plus écologiques.

Les « Entreprises fondées sur la Nature » représentent ainsi des organisations du secteur privé qui placent la nature au cœur de leurs activités en utilisant celle-ci d'une manière directe ou indirecte.

Les définitions internationales portant sur les "Solutions fondées sur la Nature" (SfN)

Au début des années 2000, l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (IUCN) a été la première organisation à utiliser le terme de SfN. Elle a proposé une première définition de celles-ci considérés comme des « actions visant à protéger, gérer de manière durable et restaurer des écosystèmes naturels ou modifiés ».

Ce terme a ensuite été considéré comme une norme dans un grand nombre d’institutions - y compris au sein du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE). Ces solutions peuvent en effet permettre de relever les défis sociétaux d'une manière efficace et adaptative, en offrant simultanément des avantages en termes de bien-être humain et de biodiversité. Un aspect essentiel de la définition de l’UICN réside dans la finalité humaine des SfN. Une Solution fondée sur la Nature doit satisfaire à deux exigences principales :

  • contribuer de façon directe à un défi de société identifié, autre que celui de la conservation de la biodiversité ;
  • s’appuyer sur les écosystèmes et présenter des bénéfices pour la biodiversité.

En outre, en protégeant, gérant ou restaurant des systèmes naturels, les SfN peuvent répondre à plusieurs objectifs du développement durable (ODD) : résilience face aux changements climatiques et aux risques de catastrophe ; prospérité économique et sociale ; sécurité de l’eau ; santé et sécurité alimentaire.

Les SfN englobent en effet de multiples dimensions : planification spatiale stratégique, ingénierie douce et performance, y compris la foresterie urbaine, les systèmes durables de gestion des eaux de ruissellement urbain, la conception à faible empreinte carbone, l’adaptation axée sur les écosystèmes, la diminution des risques de catastrophes basés sur les écosystèmes, l’ingénierie écologique, les services écosystémiques, les infrastructures bleues, les infrastructures vertes et les infrastructures bleues-vertes**[1]** Un certain nombre de cadres européens et internationaux, tels que le Green Deal de l’UE (Commission européenne, 2019), l’Agenda 2030 (ONU, 2016), le Sommet Action Climat 2019 de l’ONU, le Convention sur la diversité biologique (CBD, 2021) et la Stratégie de l’UE en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030 (Commission européenne, 2021), ont mis les SfN en avant. En 2022, l’Union européenne a confirmé cette définition, les considérant comme des « actions inspirées par, soutenues par ou copiées de la nature ». Des cadres nationaux les encouragent également - pour la France, se référer en particulier au « Plan national d’adaptation au changement climatique 2018-2022 (PNACC-2) » ainsi qu’au « Plan Biodiversité (2018) ».

Des solutions comportant de nombreuses nuances

Des termes plus anciens rendent également compte des différentes nuances propres aux SfN - à l’instar du biomimétisme, des infrastructures vertes et hybrides, des services écosystémiques, des réserves environnementales et de l’ingénierie écologique. Enfin, certains termes apparentés peuvent refléter des applications spécifiques des SfN - comme l’adaptation basée sur les écosystèmes, les caractéristiques naturelles et fondées sur la nature, et l’adaptation verte.

Les SfN peuvent renvoyer à :

  • des caractéristiques naturelles : processus écologiques tels que des services au sein de systèmes de gestion d'infrastructures. Ces approches peuvent parfois engendrer un processus de gestion explicite qui identifie les fonctions et les services déjà fournis par un écosystème spécifique. Les zones humides existantes peuvent par exemple empêcher le ruissellement de sédiments et de nutriments dans le cadre d’un ensemble de champs cultivés. Elles peuvent inclure différents types d’interventions. Elles peuvent réguler les flux d’eau et améliorer la qualité de celles-ci ainsi que les quantités, garantissant ainsi la protection des ressources et des services d’approvisionnement. Elles permettent également de restaurer et de gérer les bassins versants et les rivières. Les SfN peuvent en outre être utilisées sur les côtes à risque et permettre aussi de restorer des écosystèmes tels que les mangroves et les marais. Elles peuvent permettre de réduire l’impact des vagues et des marées lors de tempête. Elles peuvent favoriser les conditions nécessaires à la pêche. Elles peuvent aussi restaurer la biodiversité ou encore augmenter la captation du carbone.

  • des systèmes de haute technologie utilisant des processus naturels : les Solutions fondées sur la Nature sont souvent assez sophistiquées techniquement, à la fois dans le cadre de leur développement et de leur gestion. C'est par exemple le cas de la réalimentation d’un aquifère utilisé comme réservoir souterrain pour le traitement ou le stockage de l’eau. Les SfN peuvent également consister à mettre en œuvre des infrastructures vertes, en envisageant l’utilisation de matériaux semi-naturels et d’infrastructures côtières naturelles. C'est le cas des forêts de mangroves et des récifs coralliens, par exemple. Elles permettent ainsi de protéger les rivages et les communautés des inondations côtières. Elles peuvent aussi aider à atténuer les impacts de l’élévation du niveau de la mer. Dans ce contexte, assureurs, entreprises et gouvernements se basent par exemple sur la capacité de protection des mangroves pour étudier de nouvelles voies d’acheminement de produits.

Les Solutions fondées sur la Nature et la reconnaissance indispensable de leur rôle

Les organisations internationales doivent encore promouvoir les investissements et les chaînes de valeur basées sur les SfN. Ces dernières peuvent déboucher sur la création immédiate d’emplois. Elles peuvent aussi soutenir la transition vers une économie plus verte, génératrice d’emplois à long terme et résiliente face aux changements climatiques.

Pour répondre aux défis sociétaux - lutte contre le changement climatique, gestion des risques naturels, les SfN représentent des alternatives économiquement viables et durables. A long terme, elles sont souvent moins coûteuses que les investissements technologiques ou la construction et l’entretien d’infrastructures. Enfin, ces solutions sont flexibles et ajustables. En effet, elles ne nécessitent aucune infrastructure lourde et peuvent être gérées en fonction de l’évolution du climat. Les SfN présentent donc de nombreux bénéfices. Elles pourraient représenter plus d’un tiers des mesures d’atténuation des effets des changements climatiques nécessaires pour maintenir la hausse des températures en dessous du seuil de 2° C d’ici 2030. Pourtant seuls deux tiers des gouvernements soutiennent l’Accord de Paris sur le climat avec des actions SfN dans leurs plans climatiques nationaux.

Des paramètres précis et un cadre commun seraient par conséquent essentiels pour accroître la portée et l’impact de l’approche SfN. Ceci permettrait d’éviter des répercussions néfastes imprévues ou une mauvaise utilisation. De telles mesures aideraient aussi les organismes de financement, les décideurs politiques ainsi que les autres parties prenantes à évaluer l’efficacité des interventions.

Enfin, la mise en œuvre des SfN à l’échelle requise pour relever ces défis sociétaux nécessite l’implication de l’ensemble des parties prenantes, y compris du secteur privé.

Le rôle des Entreprises fondées sur la Nature (EfN)

Différents types d'organisations promeuvent l'utilisation des Solutions fondées sur la Nature.

Le terme « Organisations fondées sur la Nature » désigne des organisations privées ou du secteur tertiaire qui placent la nature au cœur de leurs activités. Elles utilisent celles-ci d'une manière directe ou indirecte. Elles le font directement en cultivant, en exploitant, en récoltant ou en restaurant durablement des ressources naturelles. Elles peuvent aussi les utiliser d'une maniète indirecte en contribuant à la planification, à la mise en place ou à la gestion des SfN. Ces organisations ne peuvent pas fonctionner d'une manière indépendante ou générer un revenu commercial - comme cela est par exemple le cas des parcs ou des réserves naturelles détenus et exploités au niveau national dans certains Etats. Elles diffèrent donc des « Entreprises fondées sur la Nature ».

Les « Entreprises fondées sur la Nature » sont des entités plutôt indépendantes, engagées dans une activité économique. Par exemple, elles peuvent générer la vente de produits ou de services à un prix donné, sur un marché spécifique/direct en utilisant la nature d'une manière directe ou indirecte - ceci qui constituera un élément central de leur offre de produits et de services.Il peut s’agir d’activités diverses tendant à :

  • Encourager l’accroissement des investissements locaux, régionaux et nationaux dans la gestion de bases de ressources naturelles, par l’identification de biens et services axés sur la nature et commercialement rentables ;
  • Renforcer les chaînes de valeur et l’accès au marché des biens et services commercialement rentables produits par les communautés ;
  • Offrir un soutien technique et administratif aux communautés ;
  • Améliorer le développement des capacités et la formation des communautés et des agents de vulgarisation dans des domaines tels que la gestion des affaires et les compétences comptables, afin de permettre une exploitation et un fonctionnement réussis des entreprises ;
  • Contribuer à l’obtention d’un gain net de biodiversité.

A ce titre, les Entreprises fondées sur la Nature peuvent être bénéfiques pour les organisations locales dans la mesure où elles crééent de nouvelles opportunités économiques qui sont insérées dans le cadre d'environnements naturels. Dans ce cadre, le Secrétariat de l’UICN a également développé un standard international qui guide les porteurs de projets et les décideurs publics et privés afin de mieux qualifier les projets de Solutions basées sur la Nature et d’établir un langage commun pour l'ensemble des organisations[2].

Sources :

Ademe, « Les Solutions d'adaptation fondées sur la Nature (SafN) dans les référentiels. Etat actuel et perspectives d'amélioration du cadre normatif », Rapport final, septembre 2021.

European Commission, User guide to the SME Definition, Ref. Ares(2016)956541, 24 February 2016.

European Commission (2022), Director General for research and innovation, The vital role of nature-based solutions in a positive nature economy.

Guidance for using the IUCN Global Standard for Nature-based Solutions : a user-friendly framework for the verification, design and scaling up of Nature-based Solutions : first edition

IUCN (2020), IUCN Global Standard for Nature-based Solutions, Gland, Switzerland: IUCN.

IUCN (2020). IUCN Global Standard for Nature-based Solutions: a user-friendly framework for the verification, design and scaling up of NbS : first edition, Gland, Switzerland: IUCN.

Anyonge-Bashir, Munira, and Paul Udoto. “Beyond Philanthropy: Community Nature-Based Enterprises as a Basis for Wildlife Conservation.” The George Wright Forum, vol. 29, no. 1, 2012, pp. 67-73.

H.-J. Hawkins, Z.-S. Venter, M.D. Cramer, “A holistic view of Holistic Management: What do farm-scale, carbon, and social studies tell us?”, Agriculture, Ecosystems & Environment, 323, (107702), (2022).

S. Mac Quaid, E/D/ Kooijman, M.-L. Rhodes, S. Cannon, “Innovating with Nature: Factors influencing the success of nature-based enterprises”, Centre for Social Innovation, Trinity Business School, Trinity College.


[1] Si, autrefois, les infrastructures grises faisaient référence aux bâtiments, aux routes ainsi qu’à d’autres constructions urbaines, de nouvelles méthodes telles que les infrastructures bleues renvoient plutôt à des éléments aquatiques, comme les rivières, les canaux, les étangs, les zones humides, les plaines inondables, les installations de traitement des eaux, par exemple.

Quant aux infrastructures vertes, celles-ci font notamment référence aux arbres, pelouses, haies, parcs, champs et forêts. Ces termes sont issus de la planification urbaine et de l’aménagement du territoire.

Par ailleurs, les infrastructures bleues-vertes peuvent également s’inscrire dans une approche de planification urbaine, dans laquelle la conception d’infrastructures naturalistes ou complètement artificielles dans la ville vise à permettre au cycle de l’eau, dans son ensemble, de se dérouler dans la ville. Cela peut améliorer la fourniture de services écosystémiques en rapport avec l’eau, comme la réduction de la pollution atmosphérique, l’irrigation des parcs ou encore la fourniture d’eau potable au niveau local. Cette approche peut également empêcher certains dégâts tels que les inondations et la dissémination de contaminants.

[2] IUCN (2020), IUCN Global Standard for Nature-based Solutions, Gland, Switzerland: IUCN.