Le suivi des projets forestiers après leur implémentation est fondamental et constitue un pilier de notre action. Reforest’Action est doté d’un processus de monitoring rigoureux, adapté aux zones géographiques et aux typologies de projets. En France et en Europe, le suivi distant est complété par un audit terrain réalisé par les chargés de projet de Reforest’Action au moins une fois au cours des cinq premières années qui suivent la mise en œuvre du projet. L'analyse des données issues de ce processus de monitoring permet de formuler des recommandations de gestion et d'appliquer des mesures correctives dans une démarche d’amélioration continue. Voici les résultats de la campagne de suivi réalisée entre avril et novembre 2023 au sein d’un panel de projets situés en Europe.
Suivre les projets à distance pour évaluer leur santé
En quoi consiste le protocole de suivi des projets à distance ?
Le suivi distant est fondé sur la remontée d’informations transmises par les porteurs de projets (propriétaires ou gestionnaires forestiers) via un outil digital de collecte de données ainsi que, le cas échéant, par téléphone. Les chargés de projet Reforest’Action analysent ensuite ces données, qui concernent notamment le taux de survie des arbres, l’état sanitaire des parcelles, les potentiels dégâts identifiés, la présence d’éléments favorables à la biodiversité ainsi que les actions mises en place par le propriétaire ou le gestionnaire de ces parcelles pour assurer la réussite du projet.
Ce suivi distant permet de vérifier l’état général des projets et le bon développement des peuplements, d’enrichir les connaissances de Reforest’Action sur chacun des projets et de préparer les visites terrain à venir.
Quels sont les résultats obtenus lors du suivi distant réalisé en 2023 ?
L’évaluation du taux de reprise
En 2023, 294 formulaires de données issus de projets situés en France et dans le reste de l’Europe ont été reçus et traités par Reforest’Action dans le cadre de la campagne de suivi distant en 2023. Ces formulaires transmis par les porteurs de projets ont rapporté un taux de reprise moyen de 79,84%. Ce taux évalue le nombre d’arbres qui sont en bonne santé par rapport au nombre total d’arbres qui ont été plantés dans le cadre d’un projet. Au total, en 2023, 71% des projets suivis à distance à travers l’Europe bénéficient ainsi d’un très bon taux de reprise, supérieur ou égal à 80%.
Le gibier et les sécheresses, deux causes fréquentes de dégâts
Les dégâts les plus fréquemment constatés au sein des jeunes forêts sont ceux infligés par le gibier, qui a impacté près de la moitié des projets suivis en Europe en 2023, mais aussi ceux liés au climat. Les épisodes de sécheresse, caractérisés par un déficit prolongé en précipitations et de plus en plus fréquents dans un contexte de réchauffement climatique, ont eu un impact sur 60,2% des projets suivis à distance dans toute l’Europe en 2023. Malgré ces aléas biotiques et climatiques fréquents, seuls 3,74% des projets pâtissent réellement d’un mauvais état sanitaire global d’après les enquêtes menées à distance, ce qui représente 3370,66 hectares cumulés, soit environ 4 millions de plants.
Quelles mesures correctrices seront mises en place pour les projets qui en ont besoin ?
Concernant les projets aux taux de reprise les moins satisfaisants, des mesures correctrices seront mises en œuvre conformément à l’engagement contractuel des porteurs de projets. Par exemple, des regarnis, qui consistent à renouveler les actions de plantation aux endroits où le reboisement a échoué, pourront être effectués afin de permettre à ces projets d’approcher un taux de reprise de 80%.
Du côté de Reforest'Action, ces projets seront surveillés plus étroitement l'année prochaine afin de vérifier l’amélioration de la santé des peuplements. Dans le cas rare d’un projet soumis à un aléa majeur, par exemple un incendie ou une inondation, Reforest’Action observe l’évolution de l’écosystème post-aléa afin de décider de la meilleure marche à suivre. Ce processus a lieu sur le temps long, au cas par cas.
Par ailleurs, nous recommandons aux porteurs de projets, en amont des plantations, d’utiliser les financements qui leur sont apportés non seulement pour réaliser les opérations de reboisement mais également pour préparer correctement les parcelles et protéger les jeunes plants de la dent du gibier.
Auditer les projets sur le terrain pour veiller à leur réussite
Comment Reforest’Action sélectionne les projets audités sur le terrain ?
Le suivi sur le terrain est réalisé par les chargés de projet de Reforest’Action au sein de la région dont ils ont la responsabilité. Parce que la quantité de projets à suivre est importante (plus de 1500 projets ont été développés en France et en Europe depuis 2010), une priorisation des suivis sur le terrain est mise en place en amont de chaque campagne annuelle. Cette priorisation a pour objectif de cibler en premier lieu les projets pour lesquels le suivi distant a révélé de potentielles problématiques. Elle vise également à s’assurer que tous les projets seront suivis sur le terrain à minima une fois au cours des cinq années qui suivent l’implémentation opérationnelle d’un projet.
En quoi consiste un suivi de projet sur le terrain ?
Pour réaliser un suivi sur le terrain, un échantillonnage est effectué au préalable au sein de la parcelle concernée afin de déterminer des placettes, c’est-à-dire des sous-parcelles qui sont considérées comme représentatives de l’état général de la parcelle : certaines placettes sont ainsi établies au sein d’une zone de végétation dense, d’autres au sein d’une zone ayant un faible taux de reprise, d’autres encore en fonction des conditions topographiques propres à la parcelle (altitude, niveau de pente, milieu rocheux ou humide...) Ce procédé de stratification, qui peut être réalisé par télédétection, permet de mettre en place un monitoring opérationnel qui reflète la réalité du projet de la façon la plus objective possible.
Au sein de ces placettes, un comptage manuel est alors effectué par le chargé de projet Reforest’Action, qui relève le nombre d’arbres vivants et morts, les essences observées ou encore la présence potentielle de régénération naturelle. Chaque typologie de projet (projets forestiers ou agroforestiers, projets de micro-forêts urbaines, projets de Régénération Naturelle Assistée ou projets labellisés Bas-Carbone) est dotée de son propre protocole de suivi défini par Reforest’Action.
Quels sont les résultats obtenus lors du suivi sur le terrain réalisé en 2023 ?
En 2023, les audits sur le terrain se sont échelonnés du mois d’avril au mois de novembre. Pour l’ensemble des 204 projets visités par Reforest’Action en Europe au cours de cette période, le taux de reprise moyen est de 88,43%.
90% de projets validés
Sur ces 204 projets, 182 projets (soit près de 90% des projets audités) ont été validés par Reforest’Action, c’est-à-dire que le chargé de projet a évalué que l’avenir de l’écosystème était assuré compte tenu de l’évolution de celui-ci. Cette validation prend notamment en compte le taux de reprise du projet, qui doit être supérieur à 80% sur la densité totale, en prenant également en compte la régénération naturelle.
Au rang des projets validés, celui de Hardelot, dans le Pas-de-Calais, a été visité par Laetitia Bernard, chargée de projet France Est pour Reforest’Action. « Ce projet a été conduit entre 2017 et 2018 pour restaurer une forêt touchée par la chalarose du frêne, une maladie parasitaire qui provoque le dépérissement des arbres qu’elle affecte », explique Laetitia. « Lors de notre audit sur le terrain en 2023, nous avons constaté une excellente reprise des arbres plantés, proche de 90%, malgré les épisodes de sécheresse réguliers qui ont affecté le département depuis 2017. Composée de hêtres, de tilleuls à petites feuilles et de charmes, la jeune forêt restaurée grâce au projet se trouve aujourd’hui enrichie de bouquets d’aulnes glutineux, régénérés naturellement et conservés par le gestionnaire forestier afin d’accentuer davantage la diversité du peuplement. Hardelot est un très bel exemple de projet réussi et validé lors du suivi terrain de Reforest’Action. »
10% de projets à corriger
Concernant les 22 projets restants, considérés comme étant « à corriger », Reforest’Action a formulé des recommandations écrites ou orales aux propriétaires forestiers afin de proposer des actions correctives à mettre en place ou à poursuivre afin d’assurer la santé et la pérennité de l’écosystème forestier.
« C’est le cas, par exemple, du projet de La Tour-de-Sçay, dans le Doubs », poursuit Laetitia Bernard. « Les premiers travaux, conduits en 2019, visaient à reboiser une parcelle anciennement peuplée d’épicéas atteints par le scolyte, un insecte xylophage. Les essences initialement choisies étaient composées de douglas, d’érables champêtres et de noyers. Mais les jeunes plants de douglas n’ont pas repris correctement. Ils ont alors été remplacés par des cèdres en 2020. Lors de notre suivi sur le terrain en 2023, le taux de reprise des cèdres était très bon. En revanche, nous avons constaté l’échec des plantations d’érables et de noyers, malgré deux tentatives de regarnis. Nous avons alors décidé, en accord avec le gestionnaire forestier, d’accompagner la régénération naturelle des hêtres, des sapins et des chênes observés sur la parcelle, et de la compléter avec de nouveaux plants de cèdres qui sont particulièrement bien adaptés à la station. Cette gestion évolutive du projet permettra ainsi d’optimiser la santé et la stabilité de l’écosystème forestier. »
Un constat central : la nécessité d’adapter les forêts au changement climatique
Sur le terrain, la même tendance a été constatée que lors du suivi distant en ce qui concerne les dégâts les plus fréquemment observés : 44,6% des projets audités en 2023 ont été touchés par des aléas biotiques, en particulier par le gibier, et 32% par des dégâts climatiques, essentiellement liés aux sécheresses.
« Ces audits sur le terrain confirment la nécessité d’adapter les forêts de demain au changement climatique et de s’appuyer sur les espèces déjà présentes et plus résistantes via la méthode de la Régénération Naturelle Assistée », témoigne Thibaud Poulain, Responsable du Pôle Forêts Tempérées de Reforest’Action. « La diversification des essences, notamment, est clé pour augmenter la stabilité et la résilience des écosystèmes face aux futurs aléas. La sélection d’espèces d’arbres différentes dans le design des projets est ainsi l’un des piliers du cahier des charges de Reforest’Action. »
La certification Ecocert Environnement
En complément de ce protocole de suivi distant et terrain réalisé par Reforest’Action, un partenariat avec Ecocert Environnement a été mis en place en 2020 afin de faire vérifier nos projets par un tiers indépendant. Auditeur spécialiste de la certification et du contrôle de projets environnementaux, Ecocert Environnement vérifie ainsi une série de critères en se fondant sur un protocole d’échantillonnage des projets financés par Reforest’Action.
Sont notamment contrôlés le nom et la localisation du projet forestier, l’année de réalisation des travaux, les essences plantées ou régénérées, l’état sanitaire de la parcelle, le taux de survie constaté, ainsi que la réalité des financements recueillis par Reforest’Action et le respect des conditions générales de vente.
A chaque visite de contrôle, les conclusions d’Ecocert Environnement sont adossées à des mesures correctives qui nous permettent de poursuivre notre démarche d’amélioration continue. En 2023, un panel de 17 projets a été audité par Ecocert Environnement, dont 16 ont été validés et 1 reste à corriger.
Une revue administrative des projets et de leur gestion est également effectuée par Ecocert Environnement, qui consiste notamment à vérifier les engagements des propriétaires forestiers, les factures témoignant de l’achat des plants et leurs certificats de provenance.
Dans un contexte de changement climatique et de risques accrus d’aléas inhérents aux écosystèmes naturels, nous faisons une priorité du suivi des projets que nous développons. Cette phase de monitoring opérationnel vise à vérifier la réussite des projets au cours des cinq années qui suivent leur implémentation. Un processus de mesure d’impact sera ensuite déployé sur certains projets à compter de la sixième année, pour évaluer la santé et la stabilité de l’écosystème et mesurer les impacts générés grâce au projet sur le climat, la biodiversité, le système sol-eau et la sphère socio-économique. La mesure de l’ensemble de ces impacts permettra d’observer la multifonctionnalité des écosystèmes, de vérifier leur résistance et leur renouvellement face aux perturbations. Elle facilitera l’accompagnement des projets dans la durée par l’implémentation d’une gestion toujours plus adaptée à leurs évolutions.