Alors qu’un quart des espèces animales et végétales connues sont aujourd’hui en voie de disparition, des initiatives continuent à se développer pour contribuer à leur préservation. Parmi celles-ci, The Global Biodiversity Standard (TGBS) est le seul standard international à reconnaître et encourager la protection, la restauration et le développement de la biodiversité. Au sein du réseau technique et scientifique du TGBS, Reforest’Action apporte son expertise en restauration des écosystèmes forestiers et en mesure d’impact pour développer des outils de suivi par télédétection, notamment pour l’évaluation de la biodiversité végétale.
La biodiversité mondiale est menacée
Alors qu’un quart des espèces animales et végétales connues sont aujourd’hui en voie de disparition, le recul de la biodiversité fait partie des cinq principaux risques mondiaux pour la société dans les dix prochaines années, d’après le Rapport mondial sur les risques 2023 du World Economic Forum. Synonyme de diversité biologique, la biodiversité englobe la diversité taxonomique, fonctionnelle et structurelle des espèces vivantes. Par l’ensemble des services écologiques qu’elle prodigue, elle est essentielle au maintien de l'intégrité et de la résilience des écosystèmes.
Parmi les principaux indicateurs de la perte de biodiversité mondiale, la diminution de l'étendue des forêts souligne le rôle essentiel de celles-ci en tant que réservoirs de biodiversité terrestre. Elles abritent en effet plus de 80 % des espèces terrestres connues de la planète. A ce titre, mieux connaître et préserver la biodiversité forestière est essentiel pour contribuer à enrayer les prémices de cette sixième extinction de masse.
La création d’un standard international dédié à la biodiversité
L’ambition du Global Biodiversity Standard
Introduit en 2022, The Global Biodiversity Standard (TGBS) est le seul standard international à reconnaître et encourager la protection, la restauration et le développement de la biodiversité. Dans un contexte de multiplication de projets de création et de restauration de forêts, ce standard vise à développer de meilleures pratiques en faveur de la création d’impacts positifs sur la biodiversité, notamment par la diversification des essences et l’intégration d’espèces natives dans le design des projets. A long terme, The Global Biodiversity Standard espère placer la biodiversité au centre de toutes les initiatives qui contribuent à lutter contre le changement climatique et à développer les moyens de subsistance des communautés locales.
Vers la certification de projets fondés sur la restauration et la protection de la biodiversité
Fondé sur un réseau scientifique et technique international qui inclut notamment l’UICN et Botanic Garden Conservation International, le CIFOR-ICRAF, les jardins botaniques royaux (Kew Gardens), Society for Ecological Restoration et Reforest’Action, The Global Biodiversity Standard teste actuellement sa méthode de certification en conditions réelles, en collaboration avec des jardins botaniques situés notamment en Inde, au Kenya, au Pérou, au Brésil, à Madagascar, en Ouganda, en Malaisie, en Jordanie et à Hong Kong.
Les projets soumis à la certification du Global Biodiversity Standard seront évalués en fonction de critères issus des « 10 règles d’or pour le reboisement ». Ce document scientifique, promulgué par les jardins botaniques royaux (Kew) et Botanic Garden Conservation International, donne la marche à suivre pour que les projets de reboisement favorisent la restauration de la biodiversité, la séquestration du carbone et la création de bénéfices socio-économiques pour les communautés locales.
Les projets certifiés par The Global Biodiversity Standard se devront ainsi de :
- Sélectionner des sites appropriés pour améliorer la biodiversité native
- Renforcer la protection des habitats existants et de leur biodiversité.
- Protéger, restaurer et gérer la biodiversité en consultation et en partenariat avec les communautés locales et les autres parties prenantes.
- Maximiser la reconstitution de la biodiversité par la restauration des écosystèmes.
- Éviter et réduire les espèces envahissantes ou potentiellement envahissantes.
- Donner la priorité à l'utilisation d'espèces natives, menacées et rares.
- Promouvoir la biodiversité et la capacité d'adaptation.
- Mettre en œuvre un suivi, une évaluation et une gestion adaptative solides de la biodiversité.
Le rôle de Reforest’Action dans le cadre du Global Biodiversity Standard
Les apports de la télédétection à l’évaluation de la biodiversité forestière
Au sein du réseau technique et scientifique du Global Biodiversity Standard, Reforest’Action apporte son expertise en restauration des écosystèmes forestiers et en mesure d’impact pour développer des outils de suivi par télédétection. Reforest’Action propose ainsi au Global Biodiversity Standard un catalogue d’outils dédiés aux mesures de télédétection. Ces mesures sont conduites à la fois en amont de la mise en œuvre des projets, et en aval, dans le cadre de leur suivi.
Si l’évaluation de la diversité des essences d’arbres est traditionnellement réalisée sous forme d'études de terrain via des échantillonnages au sein de parcelles sélectionnées, ce processus est toutefois long et coûteux pour une analyse à grande échelle. La télédétection apporte aujourd’hui de nouveaux moyens pour monitorer la biodiversité de la végétation en offrant la possibilité de générer des ensembles de données à haute résolution spatiale et temporelle afin de suivre les changements environnementaux sur le long terme. Ce suivi distant permet de détecter les évolutions qui s’opèrent au sein du couvert forestier, et ainsi d’affiner l’échantillonnage sur le terrain, afin de privilégier les études au sein de zones qui semblent connaître une évolution plus ou moins positive que les autres. Complémentaire à la télédétection, le suivi sur le terrain reste toutefois essentiel par sa précision, sa capacité à valider les données du suivi distant et à calibrer celui-ci par l’apport de données réelles qui permettent d’affiner les analyses.
Un outil pour cartographier la diversité des espèces d’arbres au sein des canopées
Parmi le catalogue d’outils proposé par Reforest’Action au Global Biodiversity Standard, le Pôle Impact de Reforest’Action collabore directement avec le standard pour le développement d’un outil dédié à la cartographie de la diversité des espèces d’arbres au sein des canopées. Fondé sur un concept développé par J.-B. Féret et G. P. Asner (2014) et alimentés par les images de Sentinel-2, un satellite du programme Copernicus de l’Agence Spatiale Européenne, la méthodologie et l’outil, réappropriés par Reforest’Action, permettent d’analyser la distribution spatiale des espèces spectrales, ces zones de végétation qui comprennent une ou plusieurs espèces végétales dotées d’une signature spectrale similaire.
Autrement dit, l’outil permet d’évaluer la diversité des essences au sein d’une parcelle donnée en les regroupant en catégories nommées « espèces spectrales » en fonction de leurs propriétés physiques et biochimiques (état physiologique, teneur en eau et en pigments, etc.). « Initialement, nous cherchions un moyen de mesurer l’évolution spatiale (au sein de la zone d’un projet) et temporelle (au cours du temps) de la diversité des peuplements forestiers par télédétection, afin de mieux orienter les échantillonnages lors des études de terrain », indique Richard Sourbès, chargé d’impact pour Reforest’Action. « En se fondant sur la méthode de J.-B. Féret et G. P. Asner, nous avons développé notre propre outil grâce à des innovations qui nous permettent d’affiner davantage notre suivi à distance et notre suivi sur le terrain. Alors que cet outil était principalement utilisé, jusqu’à présent, dans le domaine de la recherche, Reforest’Action l’applique pour la première fois dans le suivi opérationnel des projets de restauration forestière. Cette démarche innovante s’inscrit plus généralement dans l’utilisation de la télédétection dans le développement de nos projets forestiers – de la phase de conception jusqu’à celle du suivi. »
Une mission terrain conduite par Reforest’Action pour affiner l’outil et la méthodologie
Lors d’une mission conduite en février 2024 dans le cadre d’un atelier international organisé par The Global Biodiversity Standard, une équipe du Pôle Impact de Reforest’Action s’est rendue en forêt atlantique brésilienne pour confronter les données de télédétection estimées aux données relevées sur le terrain, notamment en termes de diversité des essences d’arbres dans la canopée.
« L’objectif de cette mission était de comparer l’estimation donnée par l’imagerie satellite à l’observation sur le terrain afin de vérifier leur corrélation et d’affiner notre méthodologie et notre outil », poursuit Richard Sourbès. « Concrètement, nos expérimentations au sein d’une vingtaine de parcelles forestières et agroforestières ont démontré une relation forte entre la distribution des essences spectrales et celle des essences d’arbres réellement observées sur le terrain. » Cette mission sur le terrain a ainsi montré des résultats encourageants quant à la pertinence du suivi des espèces spectrales en tant que proxy de la diversité végétale dans la canopée. La multiplication des projets suivis via cette méthode permettra, à l’avenir, d’en améliorer la précision en l’adaptant aux différents stades de maturité et aux différents types de forêts étudiés par Reforest’Action.
A terme, cet outil doit nous permettre de mieux contrôler l’évolution de nos projets en remote sensing afin d’optimiser les missions de suivi sur le terrain. Il vise également à mieux connaître les facteurs qui influencent la diversité végétale et son évolution au cours du temps, afin d’être capable de proposer des mesures correctives dès qu’une évolution négative est détectée (par exemple, la présence d’une espèce invasive). In fine, cet outil permettra de renforcer la gestion adaptative de nos projets et d’assurer au mieux la pérennité des écosystèmes forestiers sur le long terme.
Pour en savoir davantage sur la méthodologie des espèces spectrales, consultez notre article dédié : « Les espèces spectrales : une méthode innovante pour étudier la biodiversité végétale depuis l’espace ».