Reforest’Action / La vitiforesterie au service des plus grands vins
Toute l'actualité

La vitiforesterie au service des plus grands vins

Agriculture Régénératrice
Projets

L’exemple du Château Haut-Bailly

Acquis par le banquier parisien Firmin Haut-Bailly dès 1630, le domaine viticole de Haut-Bailly est situé dans la commune de Léognan, en Gironde. Après un âge d’or au début du XXème siècle suivi par une période de déclin, la propriété est rachetée et rénovée par le négociant belge Daniel Sanders en 1955, qui la transmettra ensuite à son fils Jean. En un peu plus de 40 ans, cette famille s’emploie à redonner toute sa grandeur à la propriété mythique des Graves. En 1998, l’Américain Robert G. (Bob) Wilmers acquiert le château, et investit massivement pour ancrer définitivement Haut-Bailly parmi les plus grands vins de Bordeaux. Véronique Sanders, petite-fille de Jean Sanders, prend alors la direction du domaine, patrimoine qu’elle gère avec passion et détermination.

Haut Bailly 10.jpg

Les trois vins produits à Haut-Bailly (Château Haut-Bailly, Haut-Bailly•II et HB) bénéficient tous de l’appellation d'origine contrôlée (AOC) Pessac-Léognan. Parmi eux, Château Haut-Bailly est un Grand Cru Classé qui fait la renommée internationale de la propriété.  

Un vignoble en harmonie avec son terroir

Forte de son histoire, la propriété de Haut-Bailly conserve des valeurs philanthropes, généreuses et anticonformistes, à l’image de son dernier acquéreur, Bob Wilmers. « Bien faire et faire le bien. » Prônant l’amélioration continue, c’est au travers d’une innovation raisonnée et bienveillante que le domaine œuvre au service de son terroir. Appelant à la sobriété et à la tempérance, le vignoble promeut l’harmonie entre les hommes et la nature qui le composent.

Illustration parfaite de ce juste équilibre, les nouveaux chais, à moitié enterrés, jouent à cache-cache avec le paysage : architecture voluptueuse, toit végétalisé, terrasse panoramique, ou encore salle de dégustation entièrement vitrée. S’intégrant parfaitement dans leur environnement, ils sont le fruit d’une collaboration entre des centaines de personnes pendant 5 ans. Collecte et recyclage des eaux de pluie, inertie thermique, lumière naturelle, etc. : l’œuvre architecturale intègre toutes les exigences environnementales actuelles. Dans cet endroit à la fois futuriste et intemporel, Gabriel Vialard, Directeur technique pour Haut-Bailly, et son équipe affinent constamment leur savoir-faire et renforcent le lien fort qui unit les vignes à la terre.

Haut Bailly 2.jpg

Le respect du terroir fait partie de l’ADN du Château Haut-Bailly. Mais pour Véronique Sanders, Directrice du domaine, cela implique d’aller au-delà de la simple préservation de l’existant. Il s’agit d’avoir un impact positif sur l’environnement. C’est précisément parce que cette philosophie correspond à la vision de Reforest’Action, dont la mission est de développer des projets régénératifs et créateurs de valeur plurielle, qu’un projet commun est né entre les deux entités.

Un projet de vitiforesterie sur mesure

La vitiforesterie consiste à appliquer les techniques de l’agroforesterie à la viticulture. Elle vise à intégrer diverses structures végétales naturelles (haies, arbres isolés, îlots boisés, etc.) au sein des vignes, dans l’objectif de régénérer les écosystèmes naturels fortement sollicités par les activités viticoles. Il s’agit de ressusciter une forme de naturalité, disparue au profit d’une culture monospécifique de pieds de vignes.

Avec le soutien technique de Sylva Nova et de Pierre Hermans, expert forestier, Reforest’Action mène un projet de vitiforesterie au cœur du vignoble de Haut-Bailly, projet dont nous sommes également mécènes.

Haut Bailly 5 bis.jpg

Un design minutieux

Sur un terroir de haute valeur comme celui de Haut-Bailly, chaque mètre carré compte. Adopter une vision holistique était indispensable pour imaginer un projet régénératif qui tient à la fois compte des besoins du Vivant, des contraintes des vignerons et des exigences de qualité. Malgré un système très codifié, Reforest’Action a su proposer un design harmonieux, respectant l’équilibre entre viticulture et nature régénérée.

- Les haies périphériques : des haies ont été plantées autour des différentes parcelles du vignoble, en rang simple ou en double rang selon la place disponible. Elles contiennent diverses essences feuillues, telles que l’Érable champêtre, le Charme houblon, la Viorne, le Fusain, l’Amandier, l’Aubépine, le Tilleul à grandes feuilles ou le Cornouiller.

- Les alignements d’arbres : trois rangées d’arbres ont été placées à des endroits stratégiques, lignes au pied desquelles est laissée une bande enherbée. Les alignements ont les mêmes fonctions que les haies, à la différence qu’ils ne compartimentent pas le paysage et maintiennent l’ouverture du milieu.

- L’îlot boisé : un îlot de biodiversité a été implanté dans le but de créer un espace végétal couvert plus dense. Il est composé d’Érables champêtres, de Noyers, de Chênes pubescents, d’Ormes champêtres, de Pins maritimes ou encore de Cèdres de l’Atlas.

Au total, près de 6 000 plants d’une dizaine d’essences indigènes ont été intégrés au vignoble existant. Chaque plant est entouré d’une gaine protectrice pour le protéger des attaques de rongeurs, souvent fatales. L’ensemble des plantations a été mené en février 2023 par une équipe de 5 personnes.

Haut Bailly 4.png

Haut Bailly 5.jpg

Des impacts multiples

Si le suivi et l’entretien réguliers des plantations sont bien sûr nécessaires, les bénéfices mentionnés ci-dessous seront générés graduellement, de façon spontanée, au fur et à mesure de la croissance des arbres.

Restauration d’une unité paysagère

Planter des haies et des arbres en ligne permettra de fragmenter les parcelles et de reconstituer un paysage bocager. « Nous n’inventons rien, il s’agit plutôt de recréer les paysages tels qu’ils existaient il y a une cinquantaine d’années », explique Pierre Hermans, Responsable du programme vitiforestier pour le bureau d’études de Reforest’Action. Le paysage que constitue le vignoble de Haut-Bailly représente la vitrine du domaine, et son esthétique a une importance majeure sur l’image du château. La création d’un panorama arboré, significatif dès deux ans après la plantation, exercera donc une influence sur l’attractivité du terroir viticole. Plus simplement, les arbres ont la capacité de créer une clôture naturelle entre le vignoble et le reste du paysage.

Haut Bailly 6.jpg

Adaptation aux changements climatiques

Le projet aura des impacts bioclimatiques positifs. Avec le dérèglement climatique, la vigne débourre de plus en plus tôt dans l’année. Les bourgeons ainsi découverts sont alors plus vulnérables au gel tardif, et certains ne survivent pas. Les rangées d’arbres permettront de faire circuler les flux éoliens, dans le but de limiter les courants d’air froids, et agiront comme des brise-vents naturels, véritables barrières contre le froid.

On parle de conception bioclimatique, car le design du projet a été pensé en fonction des caractéristiques climatiques de la zone d’implantation, afin d’en tirer les meilleurs bénéfices et d’éviter les effets indésirables. Car, comme le précise Pierre Hermans, « si le design n’est pas adapté à la zone, on peut créer davantage de problèmes que de bénéfices, en coinçant les flux d’air froids dans les vignes par exemple. C’est donc un point d’attention majeur. »

Développement de la biodiversité

Grâce à un mélange d’essences diversifiées, les arbres et haies plantés seront un lieu d’accueil pour la faune locale. Le design vise à renforcer la biodiversité du vignoble de Haut-Bailly, refuge pour de nombreux animaux. En effet, le domaine a récemment reçu la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO) dans le cadre d’un inventaire de biodiversité. De nombreux oiseaux et autres petits animaux ont été recensés dans les endroits boisés en bordure des parcelles. Si des nichoirs en bois ont été installés depuis par le domaine, les arbres plantés par Reforest’Action permettront de créer davantage d’habitats naturels et constitueront un abri privilégié.

Haut Bailly 7.jpg

Régulation naturelle du milieu

Via le développement de prédateurs, tels que des insectes, oiseaux et chauves-souris, contre les ravageurs de la vigne, les vignerons pourront réduire encore l’utilisation d’intrants chimiques. Moins d’apports chimiques signifie également moins de stress pour la vigne elle-même. L’objectif est de favoriser les synergies qui existent naturellement entre les différents êtres vivants d’un écosystème, et de tendre vers une régulation autonome du milieu.

Lutte contre l’érosion des sols

Les impacts de la plantation d’arbres sur les sols du vignoble de Haut-Bailly, composante primordiale de son terroir, sont également à noter. Le système racinaire des arbres permettra de lutter contre l’érosion hydrique et éolienne, tout en créant les conditions favorables au développement d’une diversité de micro-organismes essentiels à la vie du sol.

La valeur ajoutée de Reforest’Action

« La vitiforesterie est une pratique assez ancienne mais oubliée, et Reforest’Action fait partie des précurseurs qui souhaitent lui redonner vie », indique Pierre Hermans. En Champagne, dans la Loire, en Bourgogne, et maintenant dans le Bordelais avec le projet Haut-Bailly : au cours des dernières années, Reforest’Action a acquis une expérience solide en matière de vitiforesterie au travers du développement de plusieurs projets en France, au sein de différents contextes géographiques.

Reforest’Action est devenu expert dans le design de projets de vitiforesterie sur mesure. « Nos designs respectent une série de contraintes : des contraintes d’espace, d’orientation, d’ombrage, de concurrence hydrique entre les arbres et la vigne, et bien d’autres », souligne Pierre Hermans. Aujourd’hui, cette expertise du terrain permet à Reforest’Action d’accompagner les vignerons dans leur prise de décision. « En tant que garants de bonnes pratiques, nous intervenons auprès des exploitants afin de leur éviter des erreurs coûteuses. Dans de nombreux cas, nous sommes l’élément déclencheur qui permet à une simple idée de devenir un réel projet à impact positif. » Mais Pierre Hermans insiste aussi sur la nécessité de rester humble : « Nous continuons à apprendre et à progresser, cela met du temps. On vérifie sans cesse, on corrige. »

Haut Bailly 8.jpg

La co-construction, clé de voûte de la vitiforesterie

L’exigence inhérente à la création des grands vins de Haut-Bailly fait écho à la justesse des actions menées par Reforest’Action. Pour mieux comprendre la vision des deux parties prenantes du projet, croisons les propos de Pierre Hermans (Reforest’Action) et de Véronique Sanders (Haut-Bailly).

Haut Bailly 9.jpg

Pierre Hermans « La dimension environnementale est le pilier central du projet. Mais il faut garder en tête qu’ici, on produit du vin. Il n’est pas question de nuire à la conduite du vignoble. Il faut s’adapter au travail de ceux qui sont sur le terrain au quotidien : comprendre les besoins de la mécanisation, prendre en compte le temps et la main d’œuvre nécessaires à l’entretien des arbres, etc. C’est pourquoi ce projet a été conçu en collaboration avec les équipes du vignoble de Haut-Bailly. C’était un prérequis pour qu’il soit bien intégré dans la vie du vignoble et accepté de tous. »

Véronique Sanders « Ce terroir de Haut-Bailly, c’est notre devoir et notre mission de le respecter, d’une part pour faire les plus grands vins possibles, et d’autre part pour le transmettre aux générations futures. Notre intention en développant ce projet de vitiforesterie est d’être en permanence en mouvement, en réflexion. De ne pas s’arrêter sur des idées préconçues, mais de continuer à chercher, à analyser, à s’améliorer. Haut-Bailly a toujours été considéré comme une propriété très innovante, à la pointe de la recherche et de la technique. Ce projet s’inscrit naturellement dans une réflexion d’avant-garde. »

**Pierre Hermans ** « Il y a eu énormément de discussions avec les équipes de vignerons pour trouver les meilleures essences ou encore définir les bons écartements entre les arbres et les lignes de vignes. Si une machine a besoin de sept mètres pour effectuer son demi-tour, il fallait qu’elle puisse continuer à le faire une fois les arbres plantés. Il ne s’agit pas uniquement de connaissances théoriques, mais aussi d’une réflexion pratico-pratique. »

Véronique Sanders* « L’expérimentation raisonnée est une composante clé de notre ADN. C’est d’ailleurs comme cela que nous abordons, parmi d’autres sujets de recherche, la question de la transition environnementale. […] Notre approche des questions d’environnement est d’abord pragmatique, c’est-à-dire guidée par le bon sens et la quête patiente de solutions efficaces et durables ; elle est ensuite scientifique, inspirée non par la croyance ou l’idéologie mais par la réalité des faits et des données objectives dont nous disposons et qui résultent de recherches approfondies ; elle est enfin centrée sur l’humain : la santé et le bien-être de nos équipes, de nos voisins et naturellement de nos clients. »

*Haut-Bailly en mouvement, 25 ans d’accomplissements

Haut Bailly 1.jpg

Le projet développé et financé par Reforest’Action au cœur du vignoble de Haut-Bailly est un parfait exemple du niveau d’exigence requis pour mener des projets de vitiforesterie. Intervenir dans la chaine de valeur d’un domaine viticole de renom comme celui du Château Haut-Bailly force à la modestie et à l’adaptation. L’expertise acquise sur des projets aux contraintes similaires nous permet aujourd’hui de délivrer des prestations entièrement sur mesure, qui génèrent des impacts positifs nets sur la santé des sols, le climat, la biodiversité et la société en général.

La vitiforesterie s’inscrit plus globalement dans une approche d’agriculture régénératrice, qui vise à garantir la résilience et la stabilité des écosystèmes agricoles sur le long terme, tout en maintenant la viabilité économique des exploitations. Produire des matières premières en restaurant les écosystèmes naturels, c'est possible.